Fin du labyrinthe

Salvador Espriu – 80 p. – 21 x 14,7 cm – 2020 – ISBN 978-2-905573-24-7 – 14 €

Traduit du catalan par François-Michel Durazzo. Edition bilingue, réalisée en coédition avec les éditions du Noroît, Montréal (Québec) et publiée avec le concours de l’Institut Ramon Llull pour la traduction.

 En si lente douleur la lumière

de ces très hauts palais devient un rêve obscur.

Et le temps en inonde le souvenir, fleur flétrie

entre les doigts âpres de pluie de mon hiver extrême.

Je garde toute la nuit les yeux ouverts, je sens le coeur

immense de la terre, la respiration

maternelle du limon, qui couve le blé à venir.

Demain viendront des heures tranquilles,

de vastes ailes d’oiseaux répandront

sur la campagne la profonde quiétude de l’été.

Il y aura peut-être bien des arbres pieux

aux ombres déployées sur d’arides chemins.

Mais moi, qui connaissais le chant secret de l’eau

les louanges du feu, de la glèbe et du vent,

je suis au fond de l’obscure prison,

j’ai descendu les marches de pierre

de son enceinte close aux parois lisses

et seul j’avance vers l’effroi du long cri

qui sous les voûtes disait mon nom.


L’édition originale de Fin du labyrinthe a été publiée à Barcelone en 1955 par les éditions Atzavara sous le titre Final del laberint. Ce texte constitue le cinquième volet d’une méditation sur la mort, sous forme d’ascèse. Au terme d’un polyptyque que forment Le Cimetière de Sinera, Les Heures, Mrs Death et Le Marcheur et le mur, la langue se dépouille en quête de la clarté qui précède la lumière, de la lumière qui accueille le je sur la rive ombreuse. Le poème se fait tour à tour chemin, ascension et traversée « au coeur de l’hiver », dans l’espoir d’un « blé à venir », du point du jour jusqu’au coucher du soleil. Dans le langage en butte au silence, à la souffrance de l’homme arbre ou cerf, poursuivi par le temps, s’accomplit la quête de l’absolu.

Traduite dans de nombreuses langues, l’oeuvre de Salvador Espriu (1913-1985) est celle d’un des plus grands poètes du XXe siècle, dont le nom fut proposé à plusieurs reprises pour le Prix Nobel de littérature.



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